6e édition : 2022
12 ouvrages de recherche en éthique et d’enseignement de l’éthique publiés entre janvier 2020 et juin 2022 ont été présélectionnés. Le jury s’est réuni le 4 octobre dernier pour désigner les lauréats dont le nom a été dévoilé le 18 novembre dernier lors de la cérémonie de remise des trophées qui s’est tenue au Salon d’honneur du Cnam de Paris en présence de Mme Bénédicte Fauvarque-Cosson, administratrice générale du Cnam. Les lauréats ont présenté leurs travaux et un prix de 2000 € leur a été remis.
Les Lauréats
Trophée de l’enseignement de l’éthique : Jérôme Ballet pour son ouvrage L’économie à l’épreuve de l’éthique – bonheur, justice, marché, éd. De Boeck Supérieur
Jérôme Ballet est enseignant-chercheur à l’UMR CNRS PASSAGES, Université de Bordeaux. Il enseigne les questions d’éthique appliquée à l’économie depuis près de 20 ans. Après un doctorat soutenu à l’université de Lille, il a enseigné à l’université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines, puis à l’université de Bordeaux. Il intervient également ponctuellement dans de grandes écoles de commerce. Il est consultant auprès des institutions internationales, notamment les agences des Nations unies et a travaillé dans différents pays, en particulier sur le continent africain.
Il a publié plus d’une centaine d’articles académiques et une vingtaine d’ouvrages dont Éthique et entreprise (édition du Seuil), Comment préserver les ressources naturelles (éditions Rue d’Ulm), Le commerce équitable (édition Ellipses), Freedom, Responsibility and Economics of the Person (édition Routledge), Child Exploitation in the Global South (édition Palgrave-Macmillan), L’économie à l’épreuve de l’éthique. Bonheur, justice, marché (édition De Boeck supérieur). Ses travaux actuels portent sur l’éthique environnementale et le rôle des émotions en économie.
« Adam Smith croyait que la prudence et la justice étaient nécessaires pour que la main invisible puisse faire coïncider la liberté individuelle et le bonheur collectif de manière durable. Jérôme Ballet développe cette conviction et démontre que notre bonheur à tous, y compris celui des plus riches, dépend de notre volonté à remettre l’éthique où elle aurait toujours dû être : au cœur de la réflexion économique. » David Robichaud, Professeur de philosophie à l’Université d’Ottawa
Le livre s’articule autour de trois axes : le bonheur, la justice et le marché. Son originalité est de partir de l’analyse économique pour chacun de ces thèmes et de la confronter à des perspectives éthiques. L’auteur interroge ces grands axes de l’économie qui reposent souvent sur des présupposés, mais dont les bases ne résistent pas à nos jugements éthiques. ll s’agit de les mettre en évidence en vue de réorienter les pratiques de l’économie :
– Comment le bonheur est-il pensé et mis en œuvre dans nos sociétés ?
– Quel degré d’équité ou d’iniquité acceptons-nous ?
– Quelle place joue le marché dans l’organisation de nos sociétés ?
ll interroge également le point de vue des économistes – et notamment des économistes libéraux les plus standards – à l’aune de considérations éthiques et nous livre un plaidoyer pour une économie moins aveugle, afin de rendre notre monde plus vivable.
Trophée de la recherche en éthique : Elsa Godart pour son ouvrage Éthique de la sincérité – survivre à l’ère du mensonge, éd. Armand Colin
Elsa Godart est docteure en philosophie, docteure en psychologie, habilitée à diriger des recherches en philosophie et en psychologie. Elle enseigne l’éthique médicale et hospitalière au sein de l’École d’Éthique de la Salpêtrière depuis 2003 pour les masters et les doctorants.
Elle exerce la psychanalyse en cabinet depuis une vingtaine d’années. Elle est également critique littéraire pour Psychologies magazine depuis 2005. Enfin, elle donne des conférences au niveau national et international. Très engagée dans une réflexion qui vise à saisir ce qui se joue dans les transformations contemporaines et dans la diffusion des idées au plus grand nombre, elle est l’auteure de plus d’une vingtaine de livres. Parmi eux, une trilogie publiée en 2020 aux éditions Hermann exposant ses recherches sur « Les métamorphoses du sujet à l’ère du virtuel », du sujet de la conscience au sujet de l’inconscient confrontés aux nouveaux comportements induits par la virtualité.
Nombreux sont ceux qui désormais se réclament sans cesse « de vérité » ou encore d’« authenticité » pour asseoir leur légitimité, alors même que se joue une glorification de la transparence. Que ce soit dans le management au cœur des organisations, du point de vue politique ou encore dans nos échanges les plus simples avec les autres, la sincérité est devenue un véritable « prétexte » qui garantirait le bien-fondé de certaines décisions ou actions.
Ainsi en est-il de celui qui, parlant ou agissant sous couvert de « sincérité », devient légitime, intouchable, crédible. Pour autant, qu’est-ce qu’être sincère ? Est-ce seulement possible ? Et plus encore : à l’heure des réseaux sociaux, lieux des informations en inflation, où intervient constamment un jeu sordide entre l’illusion et la vérité, quel sens donner à la sincérité ? Dans un contexte de fake news (infox) et de post-truth (post-vérité) où le mensonge ne se distingue plus de la vérité ; où l’on cherche constamment à satisfaire son bonheur individualiste et à retrouver de la « confiance » en la parole de l’autre, la sincérité se présente comme une valeur refuge incontournable, et même plus : comme une vertu capable de « panser » notre contemporain.
La règle en psychanalyse n’est-elle pas celle du « tout dire » ?
Philosophie, éthique, psychanalyse, politique, société, cet ouvrage est une clé pour mieux vivre le virage, parfois douloureux, de notre modernité.
L’auteur, en actualisant cette notion dans les différents champs de la société, propose une philosophie de la sincérité inédite, fruit de plus de quinze ans de recherche, et qui donne lieu à une éthique de vie : l’éthique de la sincérité.